LE MARIAGE, UNE VOCATION À VIVRE ]:;ALLIANCE l 139
Tiré de I. HIMBAZA, F-X. AMHERDT et F. MOSER,
Mariage et bénédiction. Apports bibliques et débats en Eglise, Paris, Cerf Patrimoines, 2018.
2. BREF HISTORIQUE DU SACREMENT DE MARIAGE
Afin de pouvoir situer le mariage comme vocation, alliance et bénédiction, il est indispensable d'étudier comment la
1THOMAS n'A UIN, Somme théologique, IIa-IIa, q. 24, art. 7.
Pour les questions plus larges concernant la pastorale familiale, voir entre autres le numéro de la revue Lumen Vitae (dont nous sommes le directeur-adjolnt) paru sous le titre Vers de nouvelles alliances entre famille et catéchèse, 70 (2/2015), p. 121-240; ou aussi, de Mgr Jean-Luc BRUNIN, Lesfamilles, l'Église et la société: la nouvelle donne. Entretiens avec Christopl;e Henning, Montrouge, Bayard, 2013; de Mgr Johan BoNNY (évêque d1Anvers), Église etfamille. Ce qui pourrait changer, Namur / Paris, Fidélité / Salvator, 2014.
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théologie et la célébration ecclésiales du mariage ont évolué au long des siècles. Si du point de vue catholique, nous consi dérons que « le Christ a institué les sacrements», cela ne
veut_pas dire qu'il en a déterminé les rites et les actions sym boliques, mais plutôt qu'il leur a conféré une signification
qu'ils ne posséderaient pas naturellement par eux-mêmes. Le mariage en fournit une excellente illustration: Jésus ne l'a pas« inventé», l�s bénédictions nuptiales existaient dans
la tradition juive et biblique1, des unions matrimoniales se trouvant dans les civilisations antérieures au christianisme '· et pourtant, Jésus et le No�veau Testament leur ont apporté une valeur nouvelle que l'Eglise a petit à petit systématisée2•
Dans les premiers siècles, les communautés chrétiennes se sont contentées de reprendre rorganisation juridique (contrat et consentement) et rituelle (voile de la mariée, anneau, couronne, cortège jusqu'à la maison du marié, repas de noces) du mariage dans la société romaine. Elles se sont appliquées à conférer un sens chrétien aux cérémonies d'union matrimoniale, à travers la dimension de fidélité des époux et d'indissolubilité de leur engagement. Très tôt, la ratification du mariage par l'évêque fut souhaitée et même exigée dans certains cas, comme pour le mariage des clercs.
.1. Ainsi que le déploie abondamment le texte du bibliste I. Himbaza.
Voir ci-dessus, II. La bénédiction.
2. Pour cet exposé historique, nous nous référons notamment à Korbinian R.!TZER, Le mariage dam lesÉglises chrétiennes, dul"' auxf siècle, Paris, Cer 1970; Co LECTIF, Le mariage: Conférences Saint-Serge, LX' Semaine dëtudes liturgiques, Paris 1993, Rome, Ed. Liturgiche, 1994; Jean GAUDEMET, Le mariage en Occident: les mœurs et le droit, Paris, Cerf, 1987; et surtout à Gérard. MATHON, Le mariage des chrétiens 2
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vol., coll. « Bibliothèque d'histoire du christianism· e» 31 et 34' Pa.:is' Desclée, 1993 et 1995.
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Du W' au xre siècle
Apparition de la bénédiction nuptiale
C'est donc progressivement que les chrétiens donnèrent au mariage la signification particulière qu'il revêtait pour eux, en fonction des textes scripturaires (Gn 1 et 2; Mt 19
·et Mc 10; Ep 5), notamment en tant que lieu de chemine ment spirituel de qualité et de sanctification mutuelle (cf. 1 Co 7,14). Tout en conservant les us et coutumes profanes, ils y inscrivirent une empreinte spécifique, par exemple à travers plusieurs types de bénédictions nuptiales, diversi fiées selon les régions :
- lors du couronnement de la jeune femme en Orient; Espagne et en Gaule.
- pour la remise du voile à Rome et à Milan;
- à l'entrée des époux dans la chambre matrimoniale, en
Il est caractéristique de signaler que le premier exemple
attesté d'une bénédiction nuptiale date du IVC siècle et pro
vient du mariage de la fille de l'évêque de Capoue avec le
fil� de l'évêq�e du Bénévent, le lectem: Julien, futur évêque
d'Eclane. Inau,gurée à Rome, surtout pour l'union des clercs
et de leurs déscendants, la pratique consistant à octroyer
cette bénédiction nuptiale à l'occasion d'une eucharistie se
généralisa petit à petit à tous les chrétiens et à l'ensemble de
la chrétienté1•
La doctrine desfins du mariage chrétien
L'essentiel a toujours consisté dans le style de vie chré tien conféré au mariage, face à une législation ambiante qui
concédait la subordination des épouses, voire qui permet tait leur traitement comme esclaves et légiti_!Uait l'adultère.
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de la sexualité, du corps et de l'état conjugal considéré comme inférieur à la virginité consa�rée - pessimisme qui ne trouve aucùn fondement dans l'Ecriture, mais est très ma q é par la philosophie païenne stoïcienne et néopla tonicienne -, une morale matrimoniale chrétienne fondée sur le respect mutuel de la dignité des époux s'est mise en place, entre autres grâce à l'élaboration de la doctrine des fins du mariage.
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À cet égard, certains des traités d'Augustin, nommé le
« docteur du mariage» (et mort en 430) ont profondément influencé la conception ultérieure de l'union matrimoniale :
« À coup sûr, ce n'est pas seulement la fécondité dont la fin est les enfants, ni seulement la pudicité dont le sens est la fidéli é, c'est encore un certain sacrement du m iage qui est confie aux fidèles mariés - ce qui fait dire à l'apôtre : "Maris ai ez vos femmes comme le Christ a aimé son Église". Il n: fa:11-it pas de doute que la réalité signifiée par ce sacrement, è.est que l'homme et la femme unis en mariage y persévèrent tant
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qu'ils vt'.vent sans Jamais se séparer1 ». Pour saint Augustin
donc, le mariage a pour but l'amour et la relation fidèle des époux, autant que la procréation et la descendance.
Face au systèmeféodal, la personnalisation du mariage
J?ans la perspective du droit .germanique installé après les mvas10ns barbares, le mariage était une question d'abord d'ordre socio-économique et d'accord politique entre clans et tri�us. de g antir la liberté de consentement, en p ti culier de 1 epouse, et de lutter contre les désordres sociétaux les responsables ecclésiaux ont multiplié les empêchement� et ont requis une forme publique pour le mariage infacie
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1. Cité par Gérard MATHON,« L'histoire du mariage sacramentel:
Malgré le pessimisme de certains Pères de l'Eglise, à propos
questions et ressources», dans Louis-Marie CHAUVET (dir.), Le sacre- (
1. Voir ci-dessous, 6.1. Olielques éléments d'histoire.
ment de mariage entre hier et demain, Paris, L'Atelier, 2003, p. 159-184, ici p. 163, nous soulignons.
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Ecclesiae (en présence de l'Église et des fidèles). Le prêtre s'occupait des formalités civiles, les époux étaient tenus de recevoir la bénédiction nuptiale, et donc d'avoir recours au ministre de l'Église. L'échange des consentements ne se faisait ainsi plus à la maison de la fiancée mais à la porte de l'église, les époux pouvant entrer ensuite à l'intérieur pour la messe et pour la bénédiction nuptiale.
Cette évolution cérémonielle et canonique fut assortie d'un aménagement des mœurs matrimoniales de manière à ce que le mariage fût un espace susceptible de favoriser l'épanouissement mutuel des conjoints. Dans son Instruction des laïcs1, un Jonas d'Orléans (760-843) allait même jusqu'à dire, au n. 16: « Qge les époux sachent qu'ils ont à exercer dans leur maison un ministère2». C'est donc à une per sonnalisation du. consentement que vers la fin du XIe siècle on assiste, pour faire face au système féodal et aux unions arrangées pour <l"es questions politiques et patrimoniales. L'évêque de Chartres Yves (entre 1091 et 1116) déclarait, pour s'opposer aux pratiques d'arrangement auxquelles le mariage était assujetti: « Pour ceux dont l'union conjugale doit faire un seul corps, il faut qu'il y ait consentement des âmes. Tout ce que les pères auront juré de faire à l'insu de la jeune fille sera nul si, parvenue à l'âge raisonnable, cette fille n'y consent pas». Puis il ajoutait, en rappelant la légis lation de l'empereur Justinien {483-565): « Les fiançailles tout autant que les noces s'opèrent par le consentement des .contractants3».
À cette nécessité de l'adhésion personnelle des époux à chacune des étapes du contrat, Yves adjoignait la lecture du texte-clé d'Éphésiens 5,32 et du mystère de l'union du
1. Coll.« Sources chrétiennes», n. 549, Paris, Cerf, 2012.
.2. Cité dans G. MA.Tl-ION, « L'histoire du mariage sacramentel», p.188.
3. YvEs, évêque de Chartres, Lettre 234, PL 162, col. 143, cité dans
G. MA.THON,« L'histoire du mariage sacramentel», p. 167-168.
LE MARIAGE, UNE VOCATION À VIVRE lJALLIANCE l 143
Christ avec l'Église, dont l'amour des conjoints est le signe sacramentel : « Lorsque nous séparons ceux qui se sont unis par cette loi "d'inégales conditions", nous affirmons qu'il n'y a pas là un mariage parce qu'il ne retient pas en lui le sacrement du Christ et de l'Église. L'union d'un homme et d'une femme ne me paraît pas le contenir du tout là où n'est pas présent le commandement de l'amour. Il n'est pas vrai qu'il puisse y avoir entre ces personnes un véritable amour là où l'un réduit l'autre en concubinage pour son service1». Amour et épanouissement réciproque, liberté d'engage ment des deux conjoints, valeur inestimable des promesses matrimoniales: cette personnalisation progressive a conduit à la reconnaissance du mariage comme l'un des « moyens de salut» et des « signes de la grâce » privilégiés que sont les sacrements.
Le mariage sacrement
Le mariage reconnu comme l'un des sept sacrements (dès le Xd siècle)
C'est donc dans cette perspective qu'au moment où les écoles monastiques et épiscopales et les universités nouvel lement créées réfléchissaient à la nature et au nombre des sacrements, le Livre des sentences de Pierre Lombard à Paris (1150)- promis à devenir le« manuel» théologique de base
- associait le mariage à la liste des sept « sacrements de la nouvelle loi». D'où la reconnaissance canonique et magis térielle de l'insertion du mariage au sein du « septénaire»· sacramentel qui en découla, à côté des sacrements majeurs du baptême et de l'eucharistie, par les conciles de Latran (1139) et de Vérone (1184), contre les hérésies des Cathares
1. YvEs, Lettre 242, nous soulignons.
144 I FRANÇOIS-❻VIERAMHERDT
et des « Pauvres » de Lyon qui méprisaient le corps et l'union conjugale.
C'est au pape Alexandre III vers 1�60 qu'o� doit la définition du mariage, conciliant les droits romam �t _ger manique et prenant comme base le consentement ratifie par la consommation sexuelle (ratum et consumatum). Etc est
au concile de Latran IV (1215) que fut promulguée l'obli
gation de la publication des b�ns, de manière à assurer la pleine clarté des démarches chretiennes.
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Une valeur spirituelle
C'est également l'époque où, dépassant le système féodal de subordination des serfs aux suzerains, s'installaient de nouvelles formes de sociabilité, tant dans les villes que dans la vie commune des monastères, des confréries, des frater nités et des familles. Cette personnalisation des relations humaines au sein de la société se doublait d'une réflexion spirituelle sur la grandeur de la vie matrimoniale, entre autres à la lumière d'une lecture du Cantique des Cantiques, établissant un parallèle entre l'amour du Bien-Aimé divin et
de sa bien-aimée l'Église- ou de l'âme humaine-, avec la
tendresse mutuelle des époux1.
Commentant le verset de la Genèse (2,24) où l'homme
est invité à quitter ses parents afin de s'attacher à �a femme,
LE MARIAGE, UNE VOCATION À VIVRE I:ALLIANCE l 145
La théologie scolastique
C'est l'école scolastique, issue de la Somme de saint Thomas d'Aquin1, qui a systématisé la doctrine théologique du mariage, selon la conception du sacrement comme signe visible (sacramentum) d'une réalité invisible et sacrée (res). G. Mathon la résume en ces termes de l'époque:
« Le mariage consiste en une union spirituelle [res, fin surna turelle] car c'est un sacrement. Il a pour effet un lien matériel puisqu'il est une union nécessaire à la vie sociale [sacramen tum]. Il atteint donc toujours, la vertu divine aidant, son but spirituel [res], grâce à son effet matériel. Le consente ment a donc un double effet simultané : consentement au contrat qui est aussi, de par la grâce, consentement à la vie spirituelle2 ».
À cette époque, des schémas sont proposés aux prédica teurs pour élaborer des sermons sur l'état de vie du mariage, à partir entre autres de grands textes johanniques: « Comme la femme a été formée du côté de l'homme et lui a été unie, ainsi le Christ par le sang et l'eau s'écoulant de son côté
s'est uni à l'Église comme à son épouse formée alors et qui lui engendre désormais par le baptême des fils spirituels »
(à propos de Jn 19,34). Et sur la base du miracle de Cana
Hu es de Saint Victor s'exprim�t ains : « C c1 n'est pas
(Tn 2,1-12): « L'eau des amphores est changée en vin quand
gu ! �
ceux qui étaient froids deviennent chauds, les charnels spi
dit de la communion charnelle mais de 1 affection du cceur et du lien de la communauté de l'amour. Ceci a été dit pour que l'on comprenne que le sacrement conjugal est d'ordre spirituel2 ».
DE
R.IEVAULX, cité dans G. MATHON, « L'histoire du manage sacramen-
l'amitié spirituel/� d'AELRED
sur
1. Voir à ce
propos le Traité
tel», p. 170.
PL 176, 864, cité dans ibid.
2. HUGUES DE SAINT VICTOR, De virgi,nitate Beatae Manae r irgtms,
rituels, les mondains religieux. Bienheureux ceux qui vivent ainsi dans le mariage, qui, pour l'amour de leur conjoint et de leurs fils, et pat les soins de la vie familiale, ne s'éloignent pas de l'amour de Dieu3
1. Dans la filapars, q. 41ss.
2.
3.
ibid., p. 174.
G. MATHON, « L'histoire du mariage sacramentel», p.174.
RA.ouL ARDENS, Homélies sur les évangiles, PL 155, 1747, cité par
».
11161 FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT
Le concile dr; Trenteface à la Réforme (1563)
Face aux réformateurs, le concile de Trente, dans son décret Tametsi de 1563, réaffirma la nature sacramentelle du mariage: c'est la parole des conjoints qui établit entre eux le contrat matrimonial et fait de celui-ci la «matière» du sacrement indissoluble, puisque consacré par la grâce divine, selon la phrase du Christ: «Qy.e l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni» (Mt 19,6 et Mc 10,9). Le décret de Trente imposa également, au risque sinon d'invalidité, la dite«forme canonique», c'est-à-dire l'échange des consentements des époux, en présence des témoins, devant leur propre curé.
S'en sont suivies des oppositions �durant le XIXe et le
xx.e siècle de la part des pouvoirs des Etats, voulant imposer leurs codes civils et leur forme autonome vis-à-vis du droit canonique. Pour faire barrage aux revendications des lois étatiques et des dispositions civiles, le Magistère catholique a redit au cours des deux derniers siècles que de son point de vue, il ne pouvait y avoir entre catholiques de mariage que sacramentel, notamment à travers l'encyclique Mirari vos de Grégoire XVI (1831) et les propositions 65 à 74 du Syllabus de Pie IX (1864). Cette conception se retrouve jusque dans l'actuel Code de 1983 et son canon 1055: «§ 1. L'alliance matrimoniale, par laquelle un homme et une femme consti tuent entre eux une communauté de toute la vie, ordonné par son caractère naturel au bien des conjoints ainsi qu'à la géné ration et à Féducation des enfants, a été élevée entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de sacrement. § 2. C'est pourquoi, entre baptisés, il ne peut exister de contrat matri monial valide qui ne soit, par le fait même, un sacrement.»
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baptisés catholiques ne sont pas considérés comme mariés et peuvent contracter un mariage religieux lors d'un second engagement civil ; et que, par contre, le mariage civil de baptisés de confession réformée est tenu pour sacramentel et indissoluble1•
De Vatican II àAmoris laetitia
Au cours du xx.e siècle, ce sont les développements du personnalisme communautaire depuis les années 1930, avec des ouvrages comme Le mariage, de von Hildebrand (1936), Du sens et de la.fin du mariage, de H. Doms (1937) et les mouvements de spiritualité conjugale mis en œuvre par l'Abbé Violet dès 1919 (l'Association du Mariage chrétien) et le Père Henri Ca:ffarel en 1937 (les Équipes Notre-Dame), puis les études en sciences humaines depuis les années 1950, sur la psychologie relationnelle et 1; sexua lité, grâce à des auteurs tels Marc Oraison, Albert Plé et Louis Beirnaert et les Études sexologiques et familiales de l'Institut catholique de Lille (1960) qui, bien que parfois so�pçonnées_ et mises à l'index, ont peu à peu préparé la
v01e du chapitre sur la«dignité du mariage et de la famille»
de la Constitution Gaudium et spes (1965) du concile Vatican II (n. 47-52):«C'est pourquoi les époux chrétiens,
fr�cains, d s engagements selon le droit coutumier. Cf. à ce propos les ecnts �e Mi�hel LEG�AIN, notamI13ent « Le �roit au mariage. Réflexion sur la legislation matnmomale de l'Eglise », Etudes348 (6/1978), p. 813- 824. À no�er qu:e� Su!sse et dans plusieurs pays, la législation prévoit
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que le.mariage civil soit une étape juridiquement obligatoire, avant de
De là découlent d'une art le fait que pour les catho
pouvoir contracter un mariage religieux.
liques, le seul mariage reconnu soit le sacrement ecclésial
de mariage\ que donc, !'.!n cas d'union purement civile, les
Même si de nombreux responsables pastoraux et théologiens sou haitent une valorisation pastorale du mariage civil, voire dans les pays
Ainsi, un conjoint réformé déjà engagé dans une union civile ne peut �e m�ier reli�ieuseme?t avec un conjoint catholique. Sur ce point, la theologie cat?olique se distingue donc du point de vue réformé, pour kq�el _la bénédiction divine est demandée à l'occasion du mariage civil
(voir cr-dessous, F. Moser, 3.3. Mariage civil et mariage à l'Église).
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148 1 FRANÇOIS-❻VIERAMHERDT
pour accomplir dignement les devoirs de leur état, sont fortifiés et comme consacrés par un sacrement spécial. En accomplissant leur mission conjugale et familiale avec la force de ce sacrement, pénétrés de l'Esprit du Christ qui imprègne toute leur vie de foi, d'espérance et de charité, ils parviennent de plus en plus à leur perfection personnelle et à leur sanctification mutuelle; c'est ainsi qu'ensemble ils contribuent à la glorification de Dieu. » (n. 48,2)
Le pape Jean Paul II, lui-même fortement influencé par le personnalisme, a offert un c�mmentaire de ces para graphes de la Constitution sur« l'Eglise dans le monde de ce temps », à la fois par ses catéchèses consacrées à la théologie du corps humain1, valorisant la beauté de la sexualité vécue dans un contexte de tendresse relationnelle, et par l'exhor tation Familiaris consortio (1981), approfondissant ainsi la signification du mariage somme « mystère-sacrement » de l'union du Christ et de l'Eglise (Ep 5,32) et comme voca tion à.l'alliance:
« Comme chacun des sept sacrements, le mariage est aussi un symbole réel de l'événement du salut, mais à sa manière propre. Les époux y participent en tant qu'époux, à deux, comme .couple, à tel point que l'effet premier et immédiat du mariage (res et sacramentum) n'est pas la grâce surnaturelle elle-même, mais le lien conjugal chrétien, une communion à deux typiquement chrétienne parce que
représentant le mystère d'incarnation du Christ et son mys tère d'alliance. Et le contenu de la participation à la vie du Christ est aussi spécifique: l'amour conjugal comporte une totalité où entrent toutes les composantes de la personne
·- appel du corps et de l'instinct, force du sentiment et de
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de l'union en une seule chair, conduit à ne faire qu'un cœur et qu'une âme; il exige l'indissolubilité et la :fidélité dans la donation réciproque définitive; et il s'ouvre sur la fécondité (cf. encyclique Humanae vitae, n. 9). En un. mot, il s'agit bien des caractéristiques normales de tout amour conjugal natu rel, mais avec une signification nouvelle qui, non seulement les purifie et les consolide, mais les élève au point d'en faire l'expression de valeurs proprement chrétiennes 1. »
Aussi, quand l'exhortation Amoris laetitz"a du pape François évoque la spiritualité matrimoniale et familiale comme une vocation au cœur des défis du xx1e siècle, elle contribue à déployer « l'alliance conjugale comme mystère caché et révélé2 ».
Selon le tfrre de la contribution de Xavier LACROIX, dans L.-M. CHAUVET, Le sacrement de mariage entre hier et demain, p. 185-
199. Voir également dans cette perspective les ouvrages deJean-Claude
. _ SAGNE, L'itinérairespiri'tuel du couple, Paris, St-Paul, 2001; La loi du don,
l'affectivité, aspiration de Fesprit et de la volonté -; 11 vise
une unité profondément personnelle, celle qui, au-delà
1. JEAN PAUL II,.La théologie du corps (Introduction, traduction, index et bibliographie d'Yves SEMEN), Paris, Cerf, 1984.
Lyon, Presses universitaires, 1997; et d'Alain MATTHEEuws, Les« dons» du mariage. Recherche de théologie morale et sacramentelle, Bruxelles, Éd. Culture et vérité, coll.« Ouvertures>> 19, 1996; S'aimer pour se donner. Le sacrement de mariage, coll. « Donner raison » 14, Bruxelles, Lessius, 2004; et Union et procréation. Développement de la doctrine desfins du mariage, Paris, Cerf, coll.« Recherches morales », 2006.